Adolescente, ses pieds gonflaient au gré des températures, au fil de la fatigue. Ses amis se moquaient gentiment de « ses doigts de pied tout boudinés ». C’est seulement à 46 ans, en 2017, qu’un angiologue diagnostique un lymphœdème primaire des deux jambes à Véronique. Plus de trente ans d’errance diagnostic et de retard de prise en charge médicale change une vie. Rencontre émouvante avec Véronique Bureau, enseignante et bénévole à l’Association vivre mieux le lymphœdème (AVML).
Le parcours de Véronique ressemble à un combat de tous les jours mené contre un mal-être insidieux, qui pendant plus de trente ans de sa vie n’a pas été reconnu comme une pathologie par les médecins.
" Lorsque j’ai eu mon premier érysipèle, le médecin qui me suivait ne savait pas ce que c’était et il n’a pas cherché à savoir d’où il venait. Il m’a prescrit pressothérapie et drainage lymphatique chez une kinésithérapeute. A cette époque, après les soins, je me sentais mieux. Mes jambes étaient « plus légères ». Mais seulement quelques minutes plus tard, la lourdeur revenait."
Et au fil des années, les symptômes s’aggravent. Véronique a trois enfants et après sa deuxième grossesse, elle a 2 érysipèles à quelques mois d’écart. En 2017, la lourdeur s’installe durablement dans ses jambes. Ses pieds sont abimés. Déterminée, Véronique prend un énième rendez-vous auprès de son médecin pour lui faire part de ses doutes. Elle insiste. Il finira par l’envoyer consulter un angiologue.
Un diagnostic tardif, déculpabilisant, et ces années de doute trouvent une réponse.
« Dès qu’elle me voit, le docteur Wunderlich, angiologue à Nancy, comprend ce que j’ai. Je tombe des nues mais, en même temps, je suis soulagée. »
"Je suis atteinte d’une maladie rare et chronique. Ce que je vis et traverse depuis plus de trois décennies prend sens. Cette nouvelle change ma vie : je sais ce que j’ai et je peux agir sur le gonflement de mes jambes. Ce n’est pas moi que me fais des idées, je n’ai plus à culpabiliser : il y a des traitements et des moyens pour faire en sorte d’aller mieux"
"Avec du recul, je réalise que les problèmes de santé que j’ai vécus m’ont affectée. Ne pas être entendue pendant si longtemps par les médecins a généré chez moi une grande culpabilité alors que je n’y étais pour rien."
Pour aller bien, s'appuyer sur des routines ...
"Lorsque j’étais jeune, j’ignorais ce que j’avais. Je ne faisais donc pas grand-chose pour aller mieux. Depuis que je sais, je prends du temps pour moi. J’ai mis en place des routines qui me rassurent et m’apportent du bien-être. J’essaye de me faire des bandages deux fois par semaine la nuit. Je porte des collants compressifs toute l’année, tous les jours, lors de toutes mes activités. Je fais une séance de drainage lymphatique manuel par semaine chez une kiné. J’ai des activités physiques régulières. Mon but : ressentir du plaisir à être dans l’activité et mon besoin de rester dans le plaisir. Avant le confinement Covid, je faisais de l’aquabike une fois par semaine et j’adorais ! Cela faisait un bien fou à mes jambes. Je nageais régulièrement et je fais partie d’un club de tir à l’arc. Aujourd’hui, je marche le plus possible."
Son coup de pouce ? Un outil de soutien qui l’aide à tenir tous les jours.
Une application gratuite « Santé » installée sur son portable.
« Je suis fière de moi : je fais une moyenne de 3 km tous les jours. J’utilise cette appli pour garder ma moyenne haute. Dès que mon niveau baisse, même un tout petit peu, je m’oblige à la remonter en marchant davantage ! Au quotidien - je suis mariée, j’ai des enfants et je travaille -, c’est compliqué de tenir le rythme et cette application m’encourage, elle me donne envie de me dépasser, de faire mieux ou en tout cas, pas moins que la semaine précédente. C’est un formidable outil qui booste en cas de baisse de volonté et/ou d’énergie, ce qui arrive, bien sûr..."
« Les cures font du bien et ouvrent des perspectives positives aux malades !»
En 2017, le docteur Wunderlich prescrit une cure de trois semaines à Véronique à Argelès-Gazost. Pour la première fois de sa vie, ses jambes dégonflent durablement. C’est là qu’elle suit son premier atelier d’Education thérapeutique. Là, qu’elle comprend qu’on peut devenir acteur de sa maladie en acceptant, en comprenant et en gérant ses symptômes. Ici aussi qu’elle découvre l’antenne Meurthe-et-Moselle de l’Association vivre mieux le lymphœdème (AVML).
Depuis, Véronique est bénévole pour cette association de patients. Elle œuvre aux côtés d’autres patients comme Christine Ferrotti pour que la pathologie soit reconnue et pour éviter l’errance de diagnostic à d’autres. Avant la Covid, l’antenne avait prévu d’organiser une conférence avec le Zonta Club de Toul (54). Cette association de femmes chefs d’entreprises et de professions libérales milite pour le bien-être des enfants et des femmes. Leur club propose des conférences régulièrement. Les bénévoles de l’association avaient prévu d’organiser une conférence présentée par une kinésithérapeute, sur le lymphœdème, à destination des professionnels de santé du secteur. Ce n’est que partie remise ! Plus d’information sur https://avml.fr/avml-alsace-lorraine/
Entretien réalisé par Laurence Delaporte ®Mars 2021