Patricia, Maria et Anna sont kinésithérapeutes.
Elles travaillent dans le service de lymphologie du département des maladies vasculaires rares de l’hôpital St Eloi de Montpellier. Dynamiques, elles accompagnent des patients atteints d’un lymphoedème et travaillent en équipe avec Géraldine et Agnès, infirmières d’état (lire l’interview). Rencontre dans le service du docteur Sandrine Mestre Godin du département des maladies vasculaires rares du Professeure Isabelle Quéré à l’hôpital St Eloi de Montpellier.
Patricia Marquez Cardenas
Kinésithérapeute depuis 2004, dans le service depuis 2019
Ecouter un patient, c’est pour moi le plus important. Qu’il soit entendu et soulagé le plus possible. Ils ont souvent de nombreuses questions par rapport à leur pathologie, encore méconnue et mal traitée dans le médical et le paramédical. Pour les soulager, les aider à vivre mieux leur lymphœdème, on leur donne des conseils, on les aide dans leur traitement lorsqu’ils sont perdus. On les soutient. Lorsqu’ils quittent notre service, ils nous disent « Vous nous avez écoutés, vous entendez notre souffrance et vous nous aidez. » Ça, c’est important pour moi !
Nous recevons des jeunes, des moins jeunes, des femmes, des hommes. En ce moment, nous avons un jeune homme de 15 ans. Il est né avec son lymphœdème. Il l’a intégré. Ce qui ne signifie pas que tout est simple pour lui. Mais lorsqu’un bébé nait avec un lymphœdème, il a cette maladie depuis tout petit, et cette différence, il a appris à l'assumer. Il a intégré son schéma corporel – ce qui ne veut pas dire qu’il n’en souffre jamais. C’est un vécu différent que pour un adulte dont le lymphœdème vient de se déclarer. La souffrance, le deuil de « l’ancien corps », le schéma corporel et l’intimité changent, tout comme le relationnel avec le conjoint, avec les amis, le regard des autres. La souffrance est très présente chez un adulte qui n’avait rien « avant ». Lorsqu’on diagnostique à quelqu’un une maladie chronique, rare, sa vie bascule.
Mon message aux patients
« J’aimerais leur dire qu’il faut être courageux. Qu’il ne faut pas lâcher prise. Qu’il faut s’accrocher. Une fois le diagnostic posé, il faut s’armer de patience car les choses vont changer dans leur vie. La médecine et la recherche continuent à avancer et à évoluer pour mieux connaitre le système lymphatique. Je souhaite que l’on trouve des solutions et des réponses pour palier cette maladie chronique et ses symptômes. En attendant, nous sommes là pour eux, afin de les aider et les accompagner à mieux vivre leur maladie »
Ana Santos
Kinésithérapeute depuis 2009, dans le service depuis 2022
Le matin, je travaille à 50 % en médecine interne (7 services différents). L’après-midi, je suis en lymphologie (à 50 %). Mon travail n’est pas tout à fait le même. Dans le pole polyclinique médicale (médecine interne), les pathologies touchent les artères, les veines essentiellement mais aussi les lymphatiques. L’après-midi, je travaille avec deux autres kinésithérapeutes et deux infirmières. Nous suivons des patients atteints de maladies chroniques lymphatiques comme le lymphœdème. Notre équipe est tournée vers les patients qui bénéficient d’une prise en charge complète par des médecins experts et une équipe spécialisée paramédicale en pathologie lymphatique. Nous avons la chance de compter en France des centres experts comme ici, à Montpellier, mais aussi à Paris (centre de référence) ou dans d’autres régions où il y a d’autres centres de compétence.
Mon message aux patients
« Les kinésithérapeutes, les infirmiers, les médecins qui travaillent au Centre de référence constitutif des maladies vasculaires rares montpelliérain sont très bien formés. Les patients ne trouveront pas mieux ailleurs en France en lymphatique ! »
Maria Donoso Izquierdo de los Santos
Kinésithérapeute depuis 2006, dans le service depuis 2020
Ici, au sein de l’unité de lymphologie, nous proposons un suivi quasi personnalisé aux patients atteints d’un lymphœdème. Notre équipe est composée de professionnels de santé, médical et paramédical. Elle leur apporte son expertise pour un suivi complet et une prise en charge globale et spécifique car à chaque fois nous tenons compte du vécu et de l’expérience du patient.
Concrètement, chaque matin, nous consacrons du temps à nous occuper du lymphœdème dans sa complexité : on réalise des soins cutanés personnalisés, des drainages lymphatiques puis des bandages adaptés. Souvent on met en place plusieurs techniques de bandage pour trouver celle qui fonctionne le mieux pour le patient. On est amené à les conseiller dans le choix de leur orthèse, on cherche avec eux le montage le plus efficace, le mieux adapté. Et surtout, on leur donne les outils qui participent à les rendre plus autonomes. Cela passe par l’apprentissage des techniques de l’auto-drainage et de l’auto-bandage mais pas que. Nous donnons aussi des conseils de soins cutanés et d’hygiène, on identifie les risques (érysipèle) et les bonnes conduites à tenir et leur donnons des conseils pour entretenir leurs orthèses lors des ateliers d’éducation thérapeutique (Lympheduc). En tant que kinésithérapeute, notre travail est multiple, très riche. Il est à la fois technique et humain. Nous essayons toujours de rester à l’écoute des patients. On essaie de trouver les techniques les plus pertinentes et les mieux adaptées à chaque patient en fonction de son état, de ses problématiques et de ses besoins.
Mon message aux patients
« Notre unité de lymphologie met tout en oeuvre pour créer une ambiance rassurante, de sécurité et d’écoute. Un endroit où les patients peuvent s’exprimer en tant qu’individu sans qu’ils se sentent jugés. »
Entretien réalisé par Laurence Delaporte - Juin 2023